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Disques

Barn Owl / Shadowland EP – Lost In The Glare

Jon Porras et Evan Caminiti, les deux larrons de Barn Owl, sont loin d’être en manque d’inspiration. Après leur Ancestral Star, un des albums les plus poignants de 2010, sorti en novembre dernier donc – et d’autres parutions moins relayées des projets parallèles respectifs des deux hommes*, ce sont deux disques de Barn Owl qui nous arrivent cet été, sous la forme d’un EP de trois titres intitulé Shadowland (sorti en juin) et d’un long format, Lost In The Glare, à paraître en septembre toujours sur Thrill Jockey. Deux disques qui marquent une cassure assez nette avec le dernier LP en date et ses guitares grésillantes, et où l’expérimentation revêt un visage nouveau mais toujours aussi passionnant.

Sur Shadowland, ce qui frappe d’emblée – c’est d’abord une instrumentation nouvelle, faisant usage de boucles de synthétiseurs (le disque, comme le LP qui suit, est été enregistré par Phil Manley de TransAm) et laissant les nappes de guitares assurer en arrière plan ses textures sonores. Aucune trace des envolées vrombissantes d’Ancestral Star; « Void and Devotion » (titre d’ouverture) joue sur le coté ambient distillé par les synthés pour installer un climat méditatif que les deux morceaux suivants pourront exploiter au mieux. « Shadowland » voit l’ajout d’un piano et d’une guitare au son clair jouant le même riff répété en boucle, sur lequel va se construire, en ombre chinoise, un canevas de guitares aux distorsions fébriles et hypnotisantes, un empilage monolithique de feedback et de strates de claviers. Des atmosphères plombées et oppressantes auxquelles Barn Owl nous avait inités, on se retrouve ici à arpenter des paysages sonores contemplatifs, plus désertiques et minimalistes (« Infinite Reach » évoquant presque un Stars Of The Lid) mais où l’on perçoit encore et toujours l’intéraction complice entre les deux guitares de Porras et Caminiti.

Une transition finalement assez naturelle annonçant l’album Lost In The Glare, qui renoue avec le caractère chamanique de Ancestral Star mais avec une ponctuation plus tempérée, également sous une palette de couleurs instrumentale plus vaste – le duo s’aide notamment d’un orgue farfisa et d’un clavier Juno, et toujours les drones joués à l’e-bow (un peu de technique ne fait pas de mal) qui soutiennent les arpèges de guitare en apesanteur, qui évoquent toujours le Dead Man de Jarmusch (et rappellent aussi combien cette BO est devenue une référence à elle seule). De Ancestral Star, survit cette dualité fascinante entre les guitares des deux musiciens, dansant, tournoyant souvent l’une autour de l’autre, ou trouvant un équilibre habile entre rythmiques marquées et arpèges orientalistes, empruntant à Grails ses intonations prophétiques, sur « Temple of the Winds » et ses harmonies acoustiques, ou « Turiya », dont la partie de batterie auraît pu être jouée par Adrienne Davies (Earth).

Barn Owl, toujours corps et âme, s’engage avec ces deux disques vers une musique plus vaste et plus complexe, n’oubliant pas la puissance des guitares bourdonnantes qu’on avait adoré chez eux (« The Darkest Night Since 1683 »), mais lui adjoignant d’autres influences, quitte à perdre en chemin un peu de l’unicité de leur personnalité – et pas forcément pour le pire.

* Burning a Hole Through The Sky, l’album solo de Evan Caminiti – est la première signature du label Handmade Birds mené par R. Loren (Pyramids).

En écoute: « Shadowland » (Shadowland)

En écoute: « Turiya » (Lost In The Glare)

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