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Disques

Eluvium / Similes

La quête d’un artiste vers l’évolution perpétuelle, qui le met au défi de toujours se renouveler – aussi noble soit-elle, est un chemin semé d’embûches. Certains le traversent avec brio, alors que d’autres s’y cassent les dents. On avait découvert avec enthousiasme les premiers travaux fascinants de Matthew Cooper, alias Eluvium, et ses drones brumeux aux sonorités apaisantes ; on avait adoré le long format Talk Amongst The Trees, tant que son successeur – Copia, sorti en 2007, plus accessible et radicalement différent car reposant sur des parties de piano plus classiques réussies, mais au pathos un peu trop évident – avait laissé un arrière-goût de déception.

Pour son cinquième album (toujours chez Temporary Residence), une fois n’est pas coutume – Matt Cooper se montre à nouveau sous un jour inédit puisqu’on trouve désormais dans sa musique des parties chantées. Plus qu’un changement, une petite révolution car jusque là, chez le Portlandais, la narration se cantonnait à l’instrumental, laissant peut-être davantage le champ libre à l’émotion et l’imaginaire. Pour autant, sur Similes, la voix sait se faire discrète, fantomatique, et elle ne s’impose que très rarement sur les ambiances sonores. Ces dernières, toujours grâce à l’absence de rythmes marqués, conservent un corps étiré, grâcieux et flottant ; seuls la voix, calme et laconique (rappelant parfois étrangement Ian Curtis, comme sur « Weird Creatures ») et quelques motifs réverbérés par les effets de delay viennent par instants battre une mesure filigrane et lointaine. C’est sur le superbe « Making Up Minds » que ce mariage d’électronique fluette, de pianos éthérés et de nappes de guitares brumeuses et hantées se mêlent le mieux à la voix confidente du désormais songwriter.

Quelques interludes instrumentales du plus bel effet (Nightmare 5″, « Bending Dream ») viennent tout de même ponctuer le disque, rappelant plus ostensiblement les ambiances des trois premiers albums et confirmant le propos de ce cinquième : faisant usage du piano bien plus subtilement que sur Copia, ayant recours à des paysages sonores incroyablement plus variés, tout en gardant sa couleur contemplative et extatique, la musique d’Eluvium renaît entre sommeil et éveil, entre lumière et obscurité. Les superbes visuels toujours de mise – l’artwork est encore une fois réalisé par Jeannie Lynn Paske (épouse du musicien il me semble) – Cooper ouvre avec Similes un nouveau chapitre enthousiasmant de l’histoire de son projet, et nous livre encore une fois une superbe invitation au rêve et à l’introspection. Sublime.

En écoute : « The Motion Makes Me Last »
[audio:http://temporaryresidence.com/mp3s/eluvium-the-motion-makes-me-last.mp3]

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