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Disques

Jeniferever / Spring Tides

090709aIl y a parfois certaines contradictions qui énervent, qui démangent, ou bien qu’on ne s’explique même pas. Chez les Suédois de Jeniferever – c’est assez stupide de ma part, je veux bien l’admettre – c’est ce gouffre sans fond entre l’allure penaude des quatre bonshommes, leur jeans crados, leur cheveux gras, le chewing-gum que Kristofer Jönson oublie de jeter avant de monter sur scène (et je laisserai le bénéfice du doute à propos de l’exaspérante apathie dont ils ont fait preuve lors du seul concert auquel j’ai eu l’occasion d’assister), et aux antipodes de tout ça, la beauté, le raffinement et la classe que je ne peux m’empêcher de trouver dans leur musique.

Si Choose a Bright Morning avait déjà en lui cette finesse de composition, jouant avec élégance sur les nappes de guitares claires, la batterie comme seul repère rythmique, laissant la voix androgyne et adolescente de Jönson planer en apesanteur quelque part entre les deux, il souffrait quelque peu de la jeunesse du quatuor: tombant souvant dans la répétition, tirant trop fort sur les ficelles d’une mélancolie évidente, manquant de nuance et de corps, cet album plutôt réussi à première vue s’avérait vite assez ennuyeux. Deux ans plus tard, avec Spring Tides, Jeniferever a pris soin d’éviter les pièges dans lequel il est déjà tombé, en ajoutant des cordes à son arc, tant au niveau instrumental que stylistique. La palette de sonorités s’est élargie, et le mélange pop / post-rock du quatuor – à l’image de celle de ses compatriotes de Logh en leur temps – s’évade désormais discrètement vers des contrées shoegaze dream-pop, ou même vraiment indie (« Nangijala »), des envolées lyriques (le piano fait toujours son petit effet, ici sur « St Gallen » par exemple) voire parfois un épisme mesuré qui manquait peut être à son dernier opus.

Malgré tout, le disque n’est pas sans compter quelques défauts de « jeunesse » persistants, faisant deviner des influences encore trop maternelles tirant la couverture à elles, ou laissant par moment quelques longueurs prendre le pas sur son ambiance feutrée et intimiste. Le chant de Jönson, s’il est moins susurré et a pris davantage d’assurance, tombe parfois encore dans le geignement. Mais la perfection n’est pas de ce monde, et heureusement – sur Spring Tides, la progression des Suédois ne fait aucun doute. En puisant tout juste les meilleures saveurs de leur premier effort ils livrent un disque plus mur, plus varié, bien plus plaisant. En définitive, je crois qu’il leur reste juste à grandir encore un peu. « Kristofer, sois un bon garçon et jette moi ce chewing-gum la prochaine fois ».

En écoute: « Nangijala »

[audio:http://denovali.com/jeniferever/mp3/nangijala.mp3]
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