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Disques

Miike Snow / Happy To you

Durant son époque sex-symbol, Michelle Pfeiffer, immortelle interprète de Catwoman du « Batman Returns » de Tim Burton, avait expliqué qu’elle préférait souvent les hommes avec un visage imparfait et qu’elle kiffait particulièrement les gros nez. Si, de manière tout à fait incroyable, elle n’avait pas trouvé son bonheur depuis ces déjà lointaines déclarations, elle devrait prendre rendez-vous avec les extraterrestres de la vidéo de « The Wave » : semblables à des humains, secs comme des clones d’un Iggy Pop au meilleur de sa forme mais avec un appendice nasal hypertrophié.

A l’instar de Pfeiffer, au lieu de rechercher la perfection, c’est cette altérité à la fois évidente et épicée qui semble avoir guidé la réalisation du second album des suédois (Christian Karlsson, Pontus Winnberg et Andrew Wyatt) de Miike Snow: « Happy to You ». Durant les plus de quarante minutes de celui-ci, Miike Snow ne nous épargne rien et surtout pas ces gimmicks qui pourraient le faire basculer dans le mauvais goût : les « houhouhou », les morceaux de piano tendance nineties assénés comme autant de rythmiques sur quasiment l’ensemble des morceaux, les effets de voix à la Bee Gees, les cuivres… Mais l’ensemble est contrôlé à bout de bras par les trois lascars. Véritable exercice de funambule, Il y a toujours quelque chose d’indéfinissable, que ce soit scientifique, instinctif ou uniquement talentueux qui fait que, malgré toutes ces oscillations, l’ensemble tient debout.

Car les suédois sont aussi connus comme producteurs (sous le pseudonyme de Bloodshy & Avant), responsables entre autres méfaits du hit « Poison » de Britney Spears pour lequel ils ont ramassé le Grammy du meilleur morceau de dance. Ils connaissent donc la formule pour faire remuer les pieds : que ce soit sur leur tube « The Wave », le tout en évidence « Devil’s Work » qui avec son diabolique refrain n’aurait pu s’appeler autrement, ou grâce à l’aisance d’un « Pretender » en mode funk blanc. De manière très surprenante, « Vase » et  » Arpelagos » sonnent eux comme deux titres de Vampire Weekend à qui l’ont aurait refilé un acide pour se détendre (Miike Snow a d’ailleurs remixé « The Kids Don’t Stand a Chance » des Vampire Weekend). Petit travail d’orfèvre, la douce balade « Gold Help This Divorce » gagne en sophistication et en matière tout en conservant sa délicate amertume. L’intriguant « Black Tin Box », dont le refrain louche sur le « Down By The Water »de PJ Harvey refroidit un temps l’atmosphère par son electro pop glaciale, effilée comme un cousin scandinave en plus ludique de The Knife et sur laquelle patine élégamment la voix de l’invitée Likke Li, avant que « Paddling Out », emballé comme un hymne pour dance floor surexcité ne conclue l’affaire en s’arrêtant juste avant l’orgasme, titillant cette petite insatisfaction, à la manière d’une lèvre inférieure que l’on mordille.

Finalement, c’est au niveau de sa production tout en psychédélisme flamboyant et contemporain que Miike Snow fait toute la différence, dans cette déviance assumée et contrôlée, incarnée sous la forme d’un nez hors norme. Michelle Pfeiffer aurait été sous le charme.

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