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Live Reports

Feu!Chatterton / Le Trianon ( Paris) / 10 septembre 2025

10 ans après leur premier passage au Trianon, le groupe Feu! Chatterton a choisi de revenir dans ce temple art déco du cabaret, monument historique érigé en 1894, vestige de la Belle Epoque à Paris, un des plus beaux théâtres à l’italienne de la capitale, pour la soirée de lancement de son nouvel album Labyrinthe , qui sort ce jeudi 11 septembre à minuit.

Une soirée événement annoncée il y a 10 jours à peine et le millier de places du Trianon s’était arraché en quelques heures ! Une occasion rare de voir le groupe dans une salle « à taille humaine », en tout cas à Paris et dans les grandes métropoles ; ce ne sont pas les premières dates de la tournée qui vont me démentir : les Zéniths de province, le Forest National de Bruxelles ou les deux Bercy de début 2026. Il faut dire que le groupe est taillé pour le grand large, avec une capacité à embarquer de très grosses jauges dans une communion joyeuse. Mais l’intimité d’écrins leur va si bien !! Un théâtre au pied de Montmartre, quel meilleur endroit pour apprécier et célébrer un troubadour des temps modernes et son groupe, héritiers des grands artistes français de la Butte. Car oui, Arthur Teboul, auteur-compositeur-interprète, poète, acteur, chanteur et parolier du groupe Feu! Chatterton s’inscrit dans la grande tradition des fous chantants, conteurs de notre histoire, de Trenet à Higelin en passant par Reggiani, avec ici toute la modernité rock qui va bien.

C’était la cinquième fois en dix ans que je voyais le groupe en concert. C’aurait dû être la sixième, mais la Covid, après nous avoir fait croire à un possible report, nous avait finalement privé d’un rendez-vous prometteur au théâtre des Bouffes du Nord, autre écrin magnifique de la capitale, encore plus intime (500 places). C’était en avril 2020, regrets éternels !

Quatre ans après la sortie de leur dernier album Palais d’argile , Feu! Chatterton avait donc réservé le Trianon pour présenter à un public d’initiés attentifs à leurs alertes de concerts son 5ème opus Labyrinthe . Un disque au contenu gardé secret jusque-là, le 1er single « Allons voir » étant sorti en éclaireur.

En ouverture du concert, le groupe nous offre une version plaquée or de son emballant « Compagnons », tiré de son précédent album. Pas besoin de plus pour s’assurer les bons soins d’un public déjà tout acquis. Près de deux heures d’un concert intense, avec une émotion palpable et des moments forts, de ces concerts hypnotiques dont on ressort portés d’enthousiasme et presque confiant dans l’avenir du collectif national…

J’aime l’attachement du groupe à la belle écriture, aux textes soignés -au risque d’empiler parfois trop de mots et de rendre les compositions difficiles à comprendre en live électrique. Alors évidemment, le public connaît par cœur les paroles des titres déjà iconiques, égrenés mercredi soir dans la joie absolue (« La Malinche », « Côte Concorde », « Monde nouveau » et « Ecran total » pour nous remémorer la vie par procuration en 4G de la période Covid), mais aussi dans le plus parfait respect quand il s’agit d’interpréter « L’Affiche Rouge », reprise de Léo Ferré sur un poème d’Aragon, ode aux 23 résistants du groupe Manouchian, français et étrangers, communistes, juifs, … exécutés pour avoir défendu l’idéal d’une France aimée.
Pour les nouveaux titres, il fut souvent difficile d’en apprécier les mots, mangés par la furie des guitares et des claviers. Dommage, mais n’est-ce pas souvent le cas dans le rock ? Vieux syndrome maintes fois vécu ; c’est d’ailleurs ce qui était souvent reproché dans les années 80 à Bashung, à qui le groupe doit une des inspirations de son nom. Tous les titres du nouvel album n’ont pas été égrenés, mais quand même un bel échantillon, du sublime « Mon frère » au très chaloupé « Labyrinthe » en passant par « Monolithe » et une version très émouvante de « Mille vagues », hommage au manager du groupe, Jean-Philippe Allard, décédé l’an dernier. Et puis bien sûr le tubesque « Allons voir » (ce que la vie nous réserve), hymne à l’audace qui manque tellement à cette époque où les évasions sont souvent si formatées.

L’émotion d’Arthur Teboul était extrêmement perceptible tout au long de la soirée, fier du parcours du groupe et sensible aux témoignages d’amour que la salle n’a pas manqué de lui renvoyer.
Au-delà de son talent, de sa qualité d’écriture, Arthur a un charisme et une énergie débridée, sans grand besoin d’en faire beaucoup pour embarquer une foule qui n’a pas hésité à lui redire « tu m’as conquis, j’t’adore » (pour citer qui vous savez), lorsque le chanteur s’est jeté dans la fosse pour une longue et intense séance de crowd surfing. Son phrasé est une signature vocale unique, reconnaissable entre tous, véritable instrument dont la tonalité subsiste en tonalité quand guitares, claviers et batterie se déchaînent dans un tonnerre de fer et de feu.

Derrière leur chanteur fantasque et volubile, zébulon bouillonnant à la poésie et à la sensibilité à fleur de peau, flirtant aux âmes de Ferré et Bécaud, il y a d’excellents camarades de jeu, une bande de copains devenue un groupe très performant –Sébastien Wolf et Clément Doumic aux guitares et claviers, Antoine Wilson à la basse et aux claviers et Raphaël de Pressigny à la batterie- aussi discrets à la ville que sémillants et efficaces à la scène. Dix ans après, la fraicheur du groupe est intacte, leur complicité et leur amitié restent perceptibles, dans un groupe dont le leader a une personnalité si forte qu’elle pourrait s’avérer écrasante pour le collectif. Mais il n’en est rien et on ne peut que s’en réjouir !

Définitivement, j’aime l’énergie du groupe en live, leur grand cœur, leur générosité artistique… et tout cela donne furieusement envie de les voir aussi en acoustique !!
Quant au nouvel album de Feu! Chatterton, il est sans aucun doute promis à un bel avenir et la tournée devrait être un grand succès populaire !

Vidéo live par Isatagada. Photo mise en avant Le Parisien / Olivier Lejeune

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