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Disques

Mr Protector / Pétrole

La cigale ayant chanté tout l’été se trouva fort dépourvue quand la rentrée fut venue, et qu’elle constata l’indécemment haute pile de disques qui s’étaient accumulés sur son bureau. Pas sérieux sur les devoirs de vacances, mais on s’y colle avec ce disque de Mr Protector. Voilà un nom intrigant pour un groupe, presque autant que le titre de son album – et que l’artwork de l’écrin dans lequel il se présente. Edité par ATRDR, ce petit label Pallois qu’on commence à plus qu’apprécier et à qui l’on doit les disques de Kourgane ou Tapetto Traci, Protector réconcilie efficacité bruitiste et précision métro-
nomique dans une déferlante de riffs et de breaks de batterie à vous donner le tournis.

Le disque a été enregistré dans des conditions semble t-il proches du live, à la Nef d’Angoulême. L’énergie du trio y est en tout cas fidèlement retranscrite : dès les premières notes de « Sloom »,  riffs heavy et coups de cymbales appuyés plombent l’ambiance… Mais sitôt le second titre entamé, tout s’accélère et les têtes commencent à tourner. Avec ses guitares incisives et tranchantes comme des battes de base-ball (!), « Was Kann Ich tun? » (chanté en Allemand) renvoie l’auditeur à ses instincts de headbanger les plus primitifs : les roulements de toms marquant la fin des mesures, les cassures de rythme à foison, voilà un noise-core inspiré et spasmophile comme on les aime par ici! Lorsque des parties de guitares mélodiques, jouant sur l’harmonie entre les deux six-cordes, soutenues par des rythmes plus discrets et réguliers s’invitent au milieu des morceaux le temps qu’on reprenne notre respiration, on en redemande. La voix, parfois un peu en retrait, joue elle aussi un rôle primordial, tant dans la façon avec laquelle le chant se déplie que sur l’esthétique des mots. Sur « Pétrole », on peut entendre scander ce slogan : « Il existerait encore deux trois merveilles pour les forces vives des grandes nations » notes de gratte à peine étouffées à l’appui, sur lesquelles vient se greffer un violoncelle – ajout de très bon goût qui ne contraste en rien avec l’énergie brute et poussiéreuse qui habite l’album tout entier. Sur « Matthias et Guenièvre » le chant en Anglais rappelle plus ostensiblement les groupes de hardcore US, alors que sur le reste du disque c’est la langue de Molière qui domine, un chant criard, incisif lui aussi, ou un spoken word plus dans la mesure (« Jacques », excellent titre qui n’est pas sans me rappeler certaines ambiances d’Enablers, groupe que j’aime particulièrement), parties vocales que l’on regrette presque lorsque le dernier titre de l’album, « 5-3 », instrumental, se fraye un chemin jusqu’à nos oreilles grandes ouvertes.

Encore une belle page que le label A Tant Rêver Du Roi nous ouvre avec ce trio, qui sera en tournée en Espagne début novembre et qu’on peut peut-être espérer voir par chez nous d’ici peu. En attendant, fans de noise alambiquée, de guitares subtiles, de spoken word sinueux, allez-y à fond sur ce disque : c’est une valeur sûre.

En écoute : « Was Kann Ich Tun? »

[audio:http://cdn.official.fm/mp3s/82/82442.mp3]
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