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Insight

New Order, Low Life a quarante ans…

La première ( et unique ) fois où je suis allé à l’Hacienda ( Manchester), c’était en février 1984… J’avais 22 ans. Le lendemain je voyais, totalement par hasard, The Smiths en concert dans un collège technique de Stoke on Trent ( découverts le matin même à la radio, en écoutant le single « What Difference Does it Make »). Autant dire que ces deux semaines hivernales, passées dans le nord ouest anglais, firent date dans ma petite histoire personnelle et restent dans ma mémoire… J’achetais également une cassette live d’un set de New Order, dans la boutique de disques d’occasion au rez de chaussée de Tudor House, vieille maison à colombages de Chester, ville où je restais pour visiter un ancien copain de lycée qui faisait assistant français dans la cité du nord Cheshire… Le vendeur s’appelait David Fowece, je ne sais pas ce qu’il est devenu aujourd’hui, je suppose en regard du calendrier des décennies qu’il doit frôler les 70 ans ou, à minima, le milieu de la soixantaine… C’est lui qui m’avait indiqué l’adresse de l’Hacienda et, en gros , comment faire pour s’y rendre. A cette époque là, pas d’itinéraire mappy ou google… Tu te débrouillais avec des cartes routières et des notes manuscrites sur un bout de papier.

Quoi qu’il en soit nous étions allés, en voiture Peugeot française, jusqu’à l’Hacienda, mon copain et moi. J’étais intimidé, pour le moins, bien qu’il n’y ait pas de concert ce soir là, mais une soirée DJ. Je n’en garde pas de souvenir précis. Par contre je me souviens de notre rencontre avec Peter Hook ( la première de ma vie, il y en a eu trois ou quatre autres – brèves – ensuite). Nous étions au bar et je sirotais quelque boisson moyennement forte, tout en grignotant des chips. Deux frenchies qui ne faisaient pas particulièrement attraction dans cet environnement mancuniens. Deux discrets. Hooky s’est pointé et je l’ai reconnu immédiatement. En 1984 il n’avait pas encore l’allure de rock star qu’il présenterait un an plus tard, cheveux longs et pantalon de cuir sur une paire de bottes. Il m’a paru très accessible et comme nous faisions la même taille l’aborder se fit selon un mouvement absolument naturel. J’ai bafouillé trois mots, des félicitations admiratives, auxquelles il a répondu en souriant bien que finalement peu concerné par mes phrases de fan ( ce qui se comprend)… Nous nous sommes serrés la main et je lui demandé si New Order donnait un concert dans le coin dans les jours à venir. Ils n’en donnaient pas. Ils travaillaient sur du nouveau matériel. Un troisième album. Un single deux titres allait sortir au printemps, me dit-il ( Il s’agit de « Thieves Like US / Lonesome Tonight » ndla). Je l’ai aussi entendu prononcer un autre titre « Murder », ce qui m’a parlé, parce que sur la cassette audio achetée chez Tudor House, j’avais lu , inscrit au stylo, « Murder at the Theater » que je n’avais pas encore écouté… Puis la conversation s’arrêta et, je l’avoue, j’étais aux anges.

Bernard Sumner et Peter Hook ( 1985) photo par Geoff Campbell

En mai 1985 sortait, un peu plus d’un an après cette rencontre miraculeuse ( je me remets dans le contexte) ou du moins et plus objectivement, simplement inattendue, le puissant Low Life, album énergique qui cognait fort. Les New Order continuaient d’avancer vers ce qui serait la voie caractéristique du groupe, c’est à dire un mélange de rock à guitares et de synth pop. Arthur Baker était passé par là et les musiciens résilients de l’aventure Joy Division, inventaient une nouvelle forme de rock … une seconde fois… Je n’entrerai pas dans les détails, puisque Pascal Champavert l’a très bien fait dans ce webzine, à l’occasion de la réédition intégrale et luxueuse, il y a deux ans, de cette pierre d’angle du rock anglais : https://www.darkglobe.fr/new-order-low-life-definitive-edition/

Ce qu’il faut retenir, c’est que Low Life est l’album au travers duquel New Order se trouvent. Encore jeunes , 28 ans de moyenne d’âge, les quatre ont la rage et la force est avec eux. Il y a des titres comme « Love Vigilantes » qui ne s’oublient pas – surtout pour les fans les plus anciens – avec son intro au mélodica, ou « Elegia », instrumental en hommage mémoriel dédié à Ian Curtis. « Face Up » traduit bien cette énergie encore juvénile évoquée plus haut, les paroles chantées par Bernard Sumner l’exprimant clairement: « Nous étions jeunes et nous étions fiers, et la vie était juste une porte ouverte ». Exactement ce que vous ressentez entre 20 et trente ans, peut-être et surtout si vous êtes dans un groupe de rock , aspirant à… (à quoi d’ailleurs?)

Mais je voudrais surtout retenir « Sunrise » qui m’a toujours bouleversé et aura si incroyablement provoqué en moi une sorte d’énergie colérique, si je puis dire… Le riff de basse tue. Il n’y a pas d’autres mots. Le solo de basse tue… Le lead de guitare ( même un peu loupé en live, parfois), Ennio Morriconien dans la manière, vous prend aux tripes. La batterie est infernale et les synthés de Gillian Gilbert sont gothiques sans la caricature du style…

La deuxième voix ( parlée) qu’on entend sur des versions disques, au final, est prenante, intérieure, mystérieuse. Sur ce « Sunrise » – le titre veut-il évoquer le film éponyme (1927) du cinéaste allemand Murnau, alors installé à Hollywood, ou est-il un autre clin d’œil à Ian Curtis et ses dernières heures? – New Order tutoient les anges ou parlent directement avec Dieu… Option deux. Et il y a un sacré orage dans le ciel, a Great gig in the sky… Bref, c’est un morceau de bravoure presque davantage qu’un classique. « Sunrise » est fondamentalement rock , un rock rentre dedans et introverti.

Sa version live à l’Hacienda en 1985 ( à laquelle j’aurais aimé assister) exprime tout cela et c’est sans doute une des raisons qui ont fait que j’ai tant aimé New Order. La vie des personnes de peu de foi ? Low Life? Allons donc! « Allelujah, I am a believer in New Order » comme aurait dit Robert Gretton

I‘ve been waiting to hear your voice for too long now
One way conversations do not work somehow
Tell me how does one get your soul in touch with the one above
When one way conversations pay a price for the use of love
I tried so hard last night you would not talk to me
I live with the fear of the few with the gift
And I know what’s going to be

Why did you never speak my name in front of my family
You gave a gift that you then took away
Like you never did before
Your name might be God but you don’t say that much to me
Your name might be God but you don’t say that much to me
We might be your black sheep
But you forgot us a long time ago
We might be your lost sheep
But it’s time you remembered us now

As we spend our days together, nothing can go wrong
No one told the truth about it because it was so strong
If you ever think of me, if you hear my name
If you read between the lines, you’ll hang your head in shame
These ? ears will never hear, the ice will never freeze
Whatever I have done for you I did because you complained

(Whatever you may think of me whatever you may say
I’ve lived my whole life in danger,
You’ve lived your life in hate)

( Paroles , Sunrise )

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