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Disques

Foxes in Fiction / Ontario Gothic

foxes_in_FictionQuelques semaines après le clap de fin de la saison 2014, nous remarquons, sans y avoir vraiment porté attention auparavant, que nous avions pas mal laissé traîner nos oreilles du côté du label Orchid Tapes l’année dernière: Ricky Eat Acid, Les Bilinda Butchers, Home Alone; trois projets de pop moderne très différents pour autant de (gros) coups de coeur qui avaient fait partie de la petite poignée de chroniques publiées dans notre humble webzine (un ratio qui, étant donné notre ridicule nombre de publications l’année dernière, tenait quasiment du bienheureux miracle). A tel point qu’il était, eu égard au bon goût du bonhomme, presque logique de débuter 2015 avec la dernière production de Warren Hildebrand: jeunot d’à peine vingt cinq ans mais déjà patron du label cité ci-dessus et tête pensante de Foxes in Fiction.

Depuis le tragique décès de son jeune frère et la terrible dépression consécutive à celui-ci, Hildebrand envisage la musique sous forme de thérapie grâce notamment à la découverte de la musique de Brian Eno. Ontario Gothic, le nouvel album du bonhomme, est lui aussi un album lié au deuil, celui d’une amie proche de Hildebrand. Ce disque a été un travail de longue haleine, s’étalant sur plusieurs années et des collaborations successives. On retrouve ici les violons du canadien Owen Pallett ainsi que les collaborations de ses collègues de label que ce soit Rachel Levy (R.L. Kelly), Sam Ray (Ricky Eat Acid) ou encore Caroline White (Infinity Crush) pour un résultat placé sous le signe de la délicatesse, de l’intimité et du secret. Le terme de bedroom pop a, d’ailleurs, sans doute rarement été aussi approprié non seulement du point de vue de la conception de l’œuvre mais aussi dans son interprétation sensible tant les morceaux s’y révèlent comme autant de paysages mentaux parcourus en lents travelling latéraux, des chaussons aux petons.

Dès l’entrée en matière sur la pointe des pieds de « March 2011 », entre simples lignes de guitare et de claviers et atmosphères sophistiquées, l’album se structure sur des architectures downtempo dans lesquelles les voix éthérées comme des soupirs, plus ou moins noyées comme dans les ombres d’électronica de « Glow (v079), s’adaptent à des espaces sonores constamment instables. En oscillant entre mélancolies pudiques et abstractions lumineuses mais mattes, les chansons s’apparentent à des songes délicats et légers. Ainsi, si les violons d’Owen Pallett savent se faire (avec beaucoup de talent) baroques et lyriques sur ses propres compositions, ici, ils se plient avec souplesse et bonheur pour envelopper celles de Hildebrand d’une tiède et delicate chaleur, pour éviter la dramaturgie et privilégier le choix de la retenue comme sur cette fin soudainement avortée de « Shadow’s Song ». Véritable coeur de l’album, « Ontario Gothic », le morceau éponyme, rayonne avec sa magie mélodique, son lyrisme candide, sa boucle de claviers liquides à la fois simple et irrésistible, la perfection du mariage de celle-ci avec le chant, sa douce et radieuse béatitude contagieuse. Tandis que la conclusion de l’album, « Altars », débute presque comme une chanson folk classique et dépouillée avant d’être rattrapée par l’identité sonore de l’album pour s’étirer finalement jusqu’à laisser les dernières notes du disque dessiner un avenir en suspens et brumeux.

Si les accroches stylistiques de Ontario Gothic n’ont rien de novateur et se mélangent au creuset musical généraliste de ce qu’il est désormais convenu d’appeler dream pop, Foxes in Fiction se démarque sans peine et avec talent du tout venant. Avec cette capacité particulière à faire cohabiter avec justesse et une pudeur salvatrice l’émotion persistante et éphèmère dans ses compositions, il fait vibrer doucement le sensible dans ses intervalles musicaux comme autant de frémissements dans l’éther.

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