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Les Frères Tyran – « Le bonimenteur »

Duo de vrais frangins, Les Frères Tyran jouent un rock à guitares énervées, et ne craignent pas le gros son de leurs Gibsons Lespaul et SG, répercuté par des amplis Marshall qui aiment les effets overdrive et fuzz sans compromis. Si Tyran est un pseudo, les bretons Eric et Thierry, ne l’ont sans doute pas choisi par hasard. Dès L’organisation premier lp sorti en 2019 – suivi de Demon en 2020- le ton est donné. Il restera en parfaite cohérence avec le nom retenu. L’intention n’est pas ici de jouer des bluettes, c’est acquis. Mais celle de raconter, dans un chanté/parlé évocateur et déterminé, des histoires qui disent les choses comme elles sont, pointant l’obscurité qui peut gâcher la lumière si on n’y prend garde. La description d’un monde de tyrans?

La première fois qu’on entend le noise rock singulier des Frères Tyran, ce qui vient à soi c’est son côté à la fois rentre dedans et sophistiqué, ainsi qu’une approche de l’écriture qui ne laisse pas indifférent. Une volonté étonnement positive apparaît ensuite, comme une forme de détachement de ce qui serait inutile. Ceci se vérifie dans les concerts du groupe, où les riffs des guitares, appuyés sur une section rythmique pré-enregistrée, dégagent détermination et énergie communicatives. Les Frères Tyran c’est du rock avec un discours. Pas n’importe lequel, puisqu’il me semble que la question morale y est sous-jacente – la poursuite du réel par les chemins du vrai? Les deux frères seraient ainsi les narrateurs d’étranges contes, en quête de réponses possibles, questionnant le monde en évitant la complaisance ou la mélancolie. Le public est en face d’un postulat. Dans ce cas qui nous intéresse il dépasse le cadre musical.

Esthétiquement – est-ce un effet du climat breton?-, c’est une atmosphère contrastée et parfois brumeuse qui traverse souvent les compositions des deux frères dont les textes relèvent d’une littérature orale maitrisée. Ainsi « Le Bonimenteur », sorti ce mois de novembre, est-il un exemple de ces ambiances mystérieuses décrites ou racontées. Véritable dessin animé de quatre minutes, la vidéo (non promotionnelle) est composée d’images aux tonalités sombres. Les nuances de noir s’étirent comme les ombres de personnages évoluant dans un paysage nocturne et pluvieux, lequel n’est pas sans évoquer ceux d’un répertoire cinématographique expressionniste et crépusculaire. On est entrainé à la suite d’un homme étrange, se déplaçant sur un chariot tiré par un cheval au galop. Ceux qui ont la faiblesse d’écouter ce probable charlatan venu d’on ne sait où, sont bientôt emmenés en un lieu indistinct, happés corps et âme peut-être? L’impression visuelle est captivante, hypnotique et on songe à quelques légendes anciennes de Bretagne, telle celle de L’Ankou effrayant ouvrier de la mort…

Musique, mots et images s’associent ici avec habileté et un message passe, glissé entre deux mondes. Celui du conte et celui d’une chronique qui pourrait être actuelle et sociétale. Les Frères Tyran sont-ils des raconteurs d’aujourd’hui? Deux porteurs d’histoires qui sillonnent, au son de guitares distordues, les landes battues par les pluies aux soirs d’orages et de grands vents.

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